Dernière mise à jour : 4/05/05

Leuze et sa région

                                                                                              Sauvenière, fin avril 2005.

Bonjour tout le monde,

Avec  la venue du printemps, nous avons ressenti des fourmis dans les jambes et avons, une fois de plus, repris notre bâton de pèlerin afin de partir à la découverte de notre beau pays.

Comme première sortie, c’est Leuze en Hainaut qui avait été choisie afin d’aller y visiter deux sites d’entreprises. Avant de découvrir celles-ci, quelques mots au sujet de Leuze.

Gallo-romaine, Leuze s’appelait à l’origine Lutosa qui signifie « villa boueuse ». Située dans une vallée marécageuse, elle est arrosée par la Dendre occidentale et ses affluents. Leuze a pris naissance autour d’un monastère dédié aux Saints Pierre et Paul vers le milieu du VIIe siècle.

Les paysans qui cultivent les terres du seigneur ou de la communauté religieuse, profitent tout naturellement des prairies marécageuses pour élever des moutons et travailler la laine. Le lavage s’effectue dans des étangs ou viviers creusés près des ruisseaux et les femmes tricotent des bonnets avec des aiguilles en bois ou en os.

C’est au début du XIIIe siècle qu’apparaît l’industrie drapière. Elle atteint une telle prospérité que des artisans d’Enghien viennent s’inspirer des méthodes leuzoises.

Au cours des siècles, Leuze subit guerres et incendies, mais vers 1700 apparaissent les premières machines à tricoter qui se manoeuvrent avec peine et qui exigent une main d’œuvre essentiellement masculine. Ces ouvriers, les « balotils » (fabricants de bas à l’outil) tricotent des bas à domicile. Par la suite s’ouvrent de petits ateliers de 3 ou 4 ouvriers qui possèdent ensemble une centaine de métiers et qui fabriquent environ 50.000 paires de bas par an sans que pour cela le tricot à domicile ne disparaisse.

Au milieu du XVIIIe siècle, deux tiers des habitants s’adonnent à la confection des bas.

 A cette époque sont également en activité une fabrique de draps, deux tanneries, un moulin à huile et une fabrique de poterie. L’annexion à la France, fin du XVIIIe siècle et surtout la période impériale de Napoléon Ier amena une prospérité pour la ville : la bonneterie voit sa production doubler.

En 1815, c’est la chute de Napoléon et le rattachement à la Hollande. C’est en 1817 que Guillaume, roi des Pays-Bas, élève Leuze au rang de ville.

Au XIXe siècle, Leuze connaît d’autres activités industrielles : tissu, moulins à farine, brasseries, raffineries de sel, entre autres.

En 1896, la bonneterie occupe environ 250 personnes, sans compter les filatures, teintureries et ateliers de confection qui additionnent + 600 personnes.

Après la 1ère guerre mondiale, 69 bonnetiers emploient plus de 2.000 personnes. En 1972, la bonneterie employait encore plus de 1.000 personnes et la teinturerie plus de 400. Malheureusement, il ne subsiste plus que quelques bonneteries à Leuze et la seule teinturerie a fermé ses portes suite à un incendie.

Si à l’instar de Gembloux et sa coutellerie, Leuze était connue internationalement pour la qualité de sa bonneterie, les deux villes ont malheureusement subi le même déclin.

Grâce aux subsides octroyés par l’Europe, cette partie défavorisée du Hainaut essaye maintenant de redresser la tête. Ce sont donc deux nouvelles entreprises que nous irons donc découvrir au cours de notre journée.

L’une, « Lutosa », 1er transformateur belge de pommes de terre, dirigée par Guy et Luc Van den Broecke, est une société familiale devenue internationale grâce à sa tradition et à son savoir-faire. Ils sont la troisième génération et  sont heureux de nous ouvrir leurs portes.

La toute première page de leur histoire fut écrite par leurs grands-parents, négociants de pommes de terre en l’état. Ils achetaient la marchandise aux producteurs, puis la vendaient. Ensuite  vint le tour de leurs parents qui reprirent les affaires après la deuxième guerre mondiale. La maman achetait aux agriculteurs les pommes de terre « sur pied » et papa négociait en bourse le travail de son épouse. La conjugaison de leurs efforts permit de dynamiser la société qui s’orienta vers la grande exportation dès le début des années ’50.

Vers 1960, l’activité agricole prit une nouvelle forme : la maman conclut avec des agriculteurs des contrats de culture pour une saison, prenant en charge tout le travail du producteur depuis la plantation jusqu’à la récolte. Cette maîtrise totale de la chaîne, toujours de mise aujourd’hui, assure une qualité irréprochable.

Lorsque les parents ont débuté,  leur entreprise portait tout simplement leur nom : Van den Broecke. Ensuite, l’exportation vers les pays étrangers grandissant, il fallut un nom plus simple à retenir. Ils se sont orientés vers l’origine du nom de la ville où se trouve le siège de leur premier et plus important site de production et ils ont choisi comme emblème de la société sa version latine : Lutosa.

En novembre 2004, Lutosa met en service un hall de stockage de produits surgelés d’une capacité de 27.000 palettes, toutes individuellement accessibles  Ce hall vient s’ajouter à une construction similaire construite en 1999. La première exigence est de diminuer au maximum les risques d’arrivée de chaleur. Pour ce faire, des sas intermédiaires sont installés et les halls de préparation sont maintenus à une température de – 21 ° C. La deuxième exigence est l’étanchéité des parois, la moindre source d’humidité pouvant être la cause de formation de givre et le moindre échappement d’air froid pouvant faire grimper considérablement la facture d’énergie.

L’entreprise a choisi de travailler essentiellement la variété « bintje ». Cultivée sur les riches terres argilo- limoneuses des provinces de Hainaut et de Flandre, cette variété de pomme de terre se caractérise par sa belle chair jaune et sa bonne matière sèche. Elle se prête parfaitement à la transformation, que ce soit en produits surgelés, en produits déshydratés ou encore en produits pré-frits réfrigérés.

Une grande partie des tubercules utilisés en fabrication viennent du propre stock de la société. L’entreprise s’approvisionne essentiellement auprès des agriculteurs des régions environnantes des usines. Lutosa suit les plantations pendant toute la durée de la croissance.

Après avoir été examinée au niveau de la variété, de la matière sèche et des sucres réducteurs, la récolte est stockée sur les sites de production, dans 9 silos d’une capacité totale de 100.000 tonnes. Les conditions d’entreposage sont très strictes et bénéficient des dernières innovations en matière de gestion et de climatisation. La température du silo de même que son degré d’humidité sont régulièrement relevés de manière à prendre les mesures nécessaires en fait d’aération et de ventilation.

Au total, environ 550.000 tonnes de tubercules sont traitées annuellement dans les 3 usines du groupe.

Avant toute transformation les pommes de terre provenant des cellules de stockage sont triées, inspectées, calibrées de manière à réserver à chaque ligne de fabrication ( frites, spécialités, flocons) la matière première la mieux adaptée. Les pommes de terre sont ensuite plongées dans un bain de saumure, puis épluchées à la vapeur. Un triage optique par caméra et laser écarte les tubercules atteints de vices sous cutanés. Ils sont ensuite découpés, soit en bâtonnets pour les frites ou en cubes pour les pom’rissolées, en lamelles pour les pom’sautées ou en quartiers.

La découpe s’effectue à l’aide de « coupes-canon », pompes puissantes qui projettent les tubercules à très grande vitesse sur une grille dont les mailles varient selon le calibre désiré de la frite. Suivent un calibrage de longueur et d’épaisseur et un nouveau triage électronique optique ayant pour but d’écarter les produits non conformes.

Les produits conformes sont immergés dans un bain d’eau chaude pour homogénéiser leur couleur et inactiver les enzymes. Avant leur cuisson, les pommes de terre coupées sont séchées à l’air chaud en vue de limiter l’absorption d’huile et d’améliorer leur croustillance. La cuisson s’effectue dans une huile végétale portée à une température de 160 à 170 ° C et dure une minute à une minute trente. Le dégraissage qui suit a pour but d’enlever l’excédent d’huile.

Ensuite les produits sont refroidis dans un tunnel à air ambiant puis dans un tunnel à refroidissement mécanique et surgelés à – 40 ° C.

Les produits finis, conditionnés dans des sachets de 400 gr à 5 Kg sont placés dans des boîtes en carton et stockés dans des chambres froides à – 20 ° C.

Pour les flocons déshydratés, les pommes de terre coupées sont transportées hydrauliquement et cuites à la vapeur avant de passer dans un presse-purée. Les impuretés qui présentent la particularité de ne pas adhérer au tambour sont éliminées par un système de vis sans fin. Le film de pomme de terre déshydraté est floconné ou micronisé de manière à obtenir un produit sous forme de flocons ou de micro flocons.

Quant aux spécialités surgelées, ces spécialités étant des produits plus élaborés, à base de purée ou de râpures, elles sont travaillées, épicées et façonnées en fonction de la forme à obtenir : pom’duchesses, pom’croquettes, rœsti, galettes, etc.…

Vient ensuite la cuisson qui se fait soit dans une friteuse avec de l’huile végétale, soit dans un four chauffé au gaz naturel. Elles sont ensuite surgelées dans un tunnel de surgélation à spirales.

Grâce à son expertise, un assortiment large et varié a été mis au point comprenant des frites et des spécialités précuites surgelées, des frites pré frites réfrigérées et des flocons de pommes de terre.

Bref, une gamme d’une cinquantaine de produits succulents qui ne cesse de se développer.

Lutosa livre bien sûr les grandes et moyennes surfaces de Belgique mais exporte également beaucoup. Ce créneau s’effectue via des filiales ou des bureaux commerciaux situés en France, UK, Allemagne, Espagne, Chine et Amérique latine ou via des agents distributeurs aux USA et au Japon.

La quantité de pommes de terre transformées s’élève à 550.000 T par an, soit +/- 20 % de la production belge.

La capacité de production totale : 320.000 tonnes de produits finis par an.

Ces quantités colossales sont assurées par :

  •  5 lignes de production de frites surgelées et réfrigérées d’une capacité globale de 54 T/h
  • 5 lignes de production de spécialités surgelées d’une capacité globale de 6,5 T/h
  • 8 cylindres sécheurs d’une capacité totale de 3 T/h de flocons de pommes de terre.

Le chiffre d’affaires réalisé en 2003 s’est monté à 155.502.000 € dont 88 % à l’export dans plus de 60 pays.

Grâce à la compétence et à l’engagement des 610 collaborateurs du groupe, le label Lutosa est aujourd’hui unanimement reconnu comme étant synonyme de raffinement et de qualité.

Grâce aussi à de continuelles améliorations et à des investissements considérables, le Lutosa figure aujourd’hui parmi les leaders européens de l’industrie de transformation de la pomme de terre.

Visite passionnante s’il en est, très bien documentée par un guide passionné par ce qu’il fait.

Après une visite aussi intéressante l’on à peine à imaginer que l’introduction de la pomme de terre en Europe laisse encore planer bien des ombres.

Au départ ce n’était qu’une curiosité botanique. On l’appelait « topinambour » ou « poire de terre ». Et on s’en méfiait : pensez donc, une plante dont on ne pouvait transformer les racines ou les feuilles en potage ! Il devait y avoir du démon là-dessous. Aussi n’est-il guère étonnant que les premiers mangeurs de pommes de terre aient été les déshérités du moment : les prisonniers, les pauvres et aussi les soldats qui, en ces temps de mercenaires, étaient fort peu considérés. Les pommes de terre nourrissaient aussi les animaux.

On les voit apparaître pour la première fois dans les Flandres et le Luxembourg simultanément, au début du XVIIIe siècle. On les signale entre 1715 et 1720 en Hainaut, dans les villages de Hoves, Petit-Enghien et Marcq. Les pommes de terre s’y implantèrent au détriment des vesces et des pois.

Cependant, le vrai démarrage de la pomme de terre n’eut lieu qu’au cours de l’hiver très rigoureux de 1739-1740 : toutes les céréales furent anéanties par le gel, mais pas la patate. Elle vainquit de ce fait les dernières réticences.

Dix ans plus tard, à Kanegem, 151 familles sur 185 la cultivaient. Son essor fut alors rapide et la pomme de terre s’imposa dans l’alimentation à tel point qu’elle fit baisser la consommation du pain.

Les agriculteurs s’étaient en effet rendu compte qu’à surface cultivée égale, la patate permettait de nourrir deux fois plus de bouches que les céréales panifiables. En outre, elle contenait de la vitamine C qui fait défaut au pain. Son rôle fut déterminant dans l’économie, mais aussi dans la démographie.

La pomme de terre apparut comme la solution idéale à l’éternel problème alimentaire, calamité endémique de l’Ancien Régime. Combattant la famine, elle favorisa l’accroissement démographique qui, à son tour, provoqua une demande accrue de tubercules et, donc, l’extension des plantations.

La Révolution française supprimant les « dîmes ecclésiastiques », la culture des pommes de terre fut totalement libérée. Elle demeura pendant le XIXe siècle la meilleure garantie contre la famine jusqu’à ce que l’arrivée massive des blés à bon marché provenant des pays neufs comme les Etats-Unis, l’Australie et le Canada relégua définitivement ce fléau au rang des mauvais souvenirs.

Musée Mahymobiles

Lorsque Ghislain Mahy achète en 1944 sa première voiture, il ne se doute pas que cette Ford T est la première pièce d’une collection qui totalisera près de 1000 véhicules en l’an 2000. Cette collection, unique au monde par sa diversité, retrace l’histoire mondiale de l’automobile de 1895 à nos jours.

Ces ancêtres ont hanté durant un demi-siècle  l’ancien « cirque d’hiver » à Gand. Ensuite, 250 joyaux mécaniques furent transférés à « Autoworld » dans le cadre des prestigieux musées du Cinquantenaire à Bruxelles, où ils sont toujours exposés.

En 1997, la ville de Leuze-en-Hainaut a racheté l’ancienne usine Ernalsteens en vue d’y installer le futur musée communal et c’est ainsi que naquit « Mahymobiles ».

 Au cours de la visite l’on découvre l’histoire mondiale de l’automobile de 1895 à nos jours. Plus de 200 véhicules y sont exposés et l’on peut devenir un as de la mécanique en visitant  la salle didactique. Mahymobiles nous convie également à découvrir l’étonnante collection de miniatures, la rétrospective des deux roues, bicyclettes et motos, une mini piste destinée aux enfants de 2 à 7 ans, une galerie dédiée à l’évolution de la carrosserie et aux raids.

Ici aussi c’est une guide passionnée qui nous invite dans ce hall à découvrir de superbes voitures ayant été fabriquées aux USA, en France, en Hollande, en Belgique principalement.

Certains de ces ancêtres sont pratiquement les seuls exemplaires encore connus au monde. C’est dire leur valeur inestimable. Toutes ont été restaurées en cherchant des pièces de rechange parfois dans des pays lointains, mais tout a été réalisé avec un amour passionné.  Certaines voitures ayant appartenu à de hautes personnalités sont achevées avec un luxe incroyable.

Au fil des ans, Mahymobiles envisage et espère toujours s’agrandir afin de présenter un nombre croissant d’automobiles et attractions. Comme chez Lutosa, ils en sont à la troisième génération à s’investir dans leur passion et ils espèrent du fond du cœur que leurs enfants prendront également la relève.